RAW, WILD… and FREE

Cher toi, mon corps,

Ca fait longtemps que je n’ai pas pris ma plume pour te parler. Je réalise d’ailleurs en écrivant ces mots que je ne me rendais même pas compte, toutes ces années, que c’était souvent à toi que je m’adressais quand je décidais de confier mes maux à un stylo et du papier.

Il y a six ans, tou.tes les deux, on est parti à l’aventure. Ca a duré deux ans et c’était sincèrement les deux plus belles années de notre vie commune. Enfin, on était libre de suivre notre route géographique et métaphorique. Enfin, on était libre de suivre notre intuition et nous connecter à ce qui fait du sens pour nous, la nature, la diversité, les grands espaces. Et puis, retour à la réalité du système patriarcal, nous avons traversé 2 années très sombres pendant lesquelles tu as trouvé comment m’obliger à t’écouter.

Je te présente enfin mes excuses, autrement qu’au creux de mes pensées, pour tout ce que je t’ai imposé. Tu savais mieux que moi, tu avais toutes les réponses mais je ne t’entendais pas dans le bruit de la pression sociale qui brouillait nos ondes de transmission. Tu me connais, je passe mon temps à m’excuser de tout et de rien, même de choses dont je ne suis pas vraiment l’autrice quand depuis tout ce temps tu étais le.a seul.e à vraiment avoir besoin de ce mot très simple et complexe à la fois : PARDON !

Pardon pour ma folie ; Pardon de ne pas avoir eu les codes à temps pour t’éviter toute cette souffrance qu’on t’a imposé ; Pardon de ne pas avoir évité les dangers pour te protéger ; Pardon de ne pas t’avoir écouté quand tu savais qu’il fallait fuir les situations impossibles dans lesquelles on se trouvait ; Pardon d’avoir mis autant de temps à apprendre à lire dans les yeux des gens pour savoir qui sont celleux en qui on peut avoir confiance et celleux qui méritent seulement qu’on ne fasse que passer ; Pardon pour ma détermination à reproduire un schéma obsolète qui depuis le début n’était pas fait pour nous, un simple cliché.

J’ai passé tellement de temps à regarder les “plus grand.es que moi” croyant qu’iels avaient les clefs du bonheur que j’ai complètement oublié de regarder en moi, en nous, pour trouver les réponses que je cherchais. Et au passage, j’en ai oublié aussi de prendre soin des moins privilégié.es que nous, ne comprenant pas encore comment fonctionnait vraiment le monde qui nous entoure. J’ai fait fausse route pendant longtemps, maintenant on le sait tou.tes les deux mais en vrai je cherchais à comprendre, j’étudiais, je découvrais ce qui n’était pas pour nous en me rapprochant chaque jour de notre vérité. Il m’en aura fallu du temps et des efforts surhumains pour transcender les barrières sociales entre moi et ces “plus grand.es” dont je parle, et ce n’est qu’en arrivant à leur niveau que j’ai compris… Iels n’ont pas plus compris et n’ont pas plus de clefs, pas plus que toi et moi, pas plus que “les moins privilégié.es”. Iels ont juste des privilèges pour lesquels la plupart d’entre elleux n’ont pas forcément dû se battre. Iels sont né.es comme ça, c’est injuste mais c’est comme ça que le monde a fonctionné jusqu’à maintenant… Et c’est triste en fait, parce que peu d’entre elleux connaissent la “vraie” vie et comprennent la puissance du partage et de la solidarité, quel gâchis !

Je voulais aussi te dire merci. Merci de m’avoir arrêté et d’avoir osé parler (hurler?) plus fort que le bruit. Merci de ne pas me juger. Merci d’être là, encore fidèle et prêt.e à aller partout avec moi. Merci de me permettre tous les jours d’assurer mes besoins, me rappeler que je dois le faire à chaque instant, et t’adapter quand une fois de plus je coupe la communication entre nous (oui je sais, ça m’arrive encore de le faire, mais on peut quand même s’autoriser à se dire que ça s’améliore grandement, pas vrai ?). Merci de ne pas avoir abandonné la partie… et en même temps, le jour où tu souhaiteras le faire, je serai là pour toi, on traversera ça toutes les deux comme on a traversé le reste. Mais on a encore tellement de choses à faire et vivre, tu te souviens “jusqu’à notre dernier souffle” ; que chaque matin qui démarre est “le premier jour du reste de notre vie”. J’ai tellement utilisé cette expression sans la comprendre… Maintenant, la seule chose que je sais, c’est que je ne sais rien (ou pas grand chose), le meilleur reste à venir même si les prédictions pour l’avenir de notre planète ne sont pas encourageantes. Des fois, je me dis que la planète elle est comme toi tu sais… personne ne l’écoute pourtant tout le monde l’utilise. C’est un drôle de parallèle il paraît, mais tu vois ce que je veux dire, on était écoféministe depuis le départ en fait.

On a passé tellement de temps à croire qu’on menait une bataille interne en découvrant que nombreux.ses étaient celleux qui se livraient une bataille les une.s contre les autres. Quand en fait la bataille était pour tou.tes beaucoup plus méta que ça, elle était face au temps, ancrée dans la peur et ce besoin de confort qui rassure le mental. C’était aussi simple que ça. Aujourd’hui, toi et moi, on a baissé les armes et c’est tant mieux. Se battre l’un.e contre l’autre et contre le temps n’a jamais fait aucun sens anyway… Le temps, dans le monde dans lequel on vit, c’est notre ressource la plus cher et la plus chère.
Je ne te partage plus, tu as eu ta dose, tu as envie d’autre chose, de grandes aventures géographiques, de liberté et de mouvement… je l’ai même gravé en couleur sur ton pied gauche il y a 5 ans. Le mouvement qui est le notre n’est ni linéaire, ni circulaire, il est une suite de petites boucles comme la première lettre de notre prénom, “e” pour Emmanuelle, parfois à l’endroit, parfois à l’envers, mais toujours juste et sincère. Je te suis. Je la mets en veilleuse, moi la machine à penser et je vous laisse nous diriger, vous, toi et les milliers d’émotions qui nous traversent chaque seconde. Finis les grands plans de carrière et les plans de guerre… i’m done. Je suis maintenant à votre service, comme une bibliothèque dans laquelle on ne se rend qu’en cas de besoin, c’est vous qui menez la danse maintenant et mon petit doigt me dit qu’on va probablement rire, chanter et danser… bien plus que ces dernières années.

Tout.es les trois, on est un work in progress en fait, mais on n’en avait pas conscience, parce que tout le monde nous disait qu’il y avait un moment où on trouverait une sorte de ligne d’arrivée et qu’après ça tout allait se dérouler sous nos pieds. Mais cette ligne n’existe que dans l’imaginaire collectif, en vrai, personne ne sait ni où elle est, ni si elle apparaît. Alors en attendant, autant continuer à apprendre, découvrir, rencontrer des gens fabuleux.ses et surtout arrêter d’essayer de faire semblant. Ce dont on a envie, ce n’est pas d’être cette sachant.e dans cette folie qu’on appelle “société”. On veut sauter, danser, écrire, rêver à en perdre la tête ; Montrer au monde les choses qu’on a apprises et voir celles qui nous attendent à s’en crever les yeux ; Créer du mouvement peu importe qu’il soit métaphorique ou politique à en brûler nos semelles et oublier nos corps. Rappeler aux gens qu’on a le droit au bonheur et le hurler haut et fort à s’en faire exploser le coeur. Et surtout on veut guérir, guérir les maux par des mots, guérir chaque chose et chaque être qu’on rencontre qui en fera la demande. On veut rassembler. On veut créer du lien. On ne veut plus survivre, on veut vivre et on y a le droit maintenant. En vrai, on ne sait pas exactement comment on va faire mais on va déjà essayer… Un pied devant l’autre, on connaît la chanson.

Pour conclure je voulais te dire “Forever” et “To the moon and back” à toi et toi seul.e. Car les gens vont et viennent, mais toi, tu es toujours là et tu as toujours était le.a seul.e à être toujours là. Ne change rien, moi je les aime tes hauts et tes bas, ils sont là pour nous rappeler qu’on est vivant.e et humain.e, c’est la vie c’est comme ça, tu es assez et tu l’as toujours été.

Always,
Emma.


Vous demander vos témoignages dans le cadre de mon travail sur le livre que j’écris actuellement m’a donné envie de jouer la carte de la vulnérabilité avec vous aussi en échange. Car même si aujourd’hui je me sens assez forte pour prendre du recul et écrire ce livre, ça n’a pas toujours été le cas et ce n’est pas tous les jours le cas. Je ne suis pas meilleure, je ne suis pas mieux armée, j’apprends tous les jours.

Aujourd’hui, au travers de ces quelques photos de Maud Samaha, vous découvrez un corps nu et raw qui se remet lentement d’un burn out. Mon corps peut semblé “normé” mais il ne l’a pas toujours été. Il ne l’est que parce qu’il renaît doucement, step by step, de l’ultime violence patriarcale qu’il a subi. Je vous parlerai de mon burn out dans mon livre pour sûr, ou peut-être ici aussi, je ne sais pas encore… to be continued.

Découvrez, ou redécouvrez certaines des personnes qui, grâce à leurs propres mots m’ont accompagnée sur la route de mes maux, dans l’ordre de mes propres découvertes (certains de ces éléments comportent des incohérences éthiques mais à l’époque je n’en comprenais pas encore les tenants et aboutissants alors je vous les livre malgré leurs imperfections car ils ont tout de même été une grande source d’inspiration pour moi). Belle route à vous.

Don’t Date a Girl Who Travels from David Joseph Falossi II on Vimeo.

Et la réponse qui remet l’éthique au bon endroit et les responsabilités au bon endroit. “Don’t date a girl who travels” if you’re not ready to put consent at the heart of your relationship. And do if you’re ready to understand what life really is about, what the world has to offer, why diversity is such an important concept and how we can change our world and stop violence for all.

Mon amie Axelle Minne qui a écrit ce magnifique texte à l’attention de son corps également. Cette amie chère à mes yeux et à mon coeur avec qui nous aurons été les gardiennes de nos maux pendant cette longue période de déconstruction qui aura été la notre. N’hésitez pas à suivre son travail, ses mots ont beaucoup de pouvoir, un pouvoir bienveillant qui met en lumière des éléments importants.

Leave A Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *